Chronique
Texte: Elena Martinez - Institut des humanités en médecine (IHM)
Photo: DR K H Fung / Science Photo Library

La PMA comme révélateur des rapports entre médecine et société

La procréation médicalement assistée (PMA) est un domaine qui, depuis son institutionnalisation dans les années 1970, a été perçu comme recouvrant des enjeux sociétaux importants.

Cela a justifié, à partir des années 1980, un encadrement via des commissions d’éthique et des dispositions légales. Certains pays, décrits comme libéraux, autorisent un large éventail de techniques et ne restreignent guère leur accès. D’autres, jugés restrictifs, limitent le choix des pratiques autorisées, réservant certaines aux seuls couples hétérosexuels mariés où un diagnostic de stérilité a été posé.

«Avec le recul, on observe que les réglementations de la PMA reflètent et reproduisent les normes sociales relatives au genre et aux liens de parenté, mais participent aussi à leur évolution», explique Catherine Fussinger, responsable de recherche à l’IHM. Par exemple, l’adage du droit romain selon lequel «la mère est toujours certaine, le père incertain» est un argument qui a été mobilisé pour rendre admissible le don de sperme et pour justifier l’interdiction du don d’ovocytes, toujours en vigueur en Suisse. Dans d’autres pays, la distinction entre maternité génétique, gestationnelle et parentale, vient questionner notre conception de ce qui fait d’une femme une mère: devient-on mère lorsqu’on transmet ses chromosomes? Ou parce que l’on porte et donne naissance, comme dans le cas d’une FIV avec don d’ovocytes? Ou encore parce que l’on prodigue soins et éducation, comme le font les parents d’intention lors d’une gestation pour autrui (GPA) ou d’une adoption?

Une question actuelle est celle du «droit aux origines», soit la possibilité de pouvoir accéder à l’identité des donneurs et donneuses de gamètes pour les enfants issus de leur don. Garanti en Suisse depuis l’entrée en vigueur de la loi sur la PMA en 2001, le droit aux origines est fréquemment présenté comme une évidence et une nécessité. Par le passé, l’anonymat a pourtant été considéré comme une meilleure solution pour toutes les parties et c’est encore le cas dans certains pays aujourd’hui. Les arguments d’ordre psychologique ou génétique invoqués pour ancrer ce principe de transparence, ainsi que les modalités pour assurer pratiquement ce droit aux origines, méritent un examen nuancé. Ce sera le propos des journées d’études «La PMA et sa réglementation en Europe de l’Ouest» du 7 décembre 2020 et du 22 janvier 2021 à l’UNIL.



Partagez:

 
 
 

Historienne de la médecine et responsable de recherche à l’IHM, Catherine Fussinger a réuni des collègues de l’UNIL issus du droit, de l’éthique, de la sociologie et des études genre pour organiser ce cycle sur la PMA.