Autour du globe
Photo: Adriano Machado

L'exode cubain

L’arrivée de Jair Bolsonaro à la présidence du Brésil a entraîné le départ de milliers de médecins cubains, appelés il y a quelques années pour faire face à une pénurie de personnel soignant.

En décembre dernier, un long défilé de blouses blanches munies d’énormes bagages s’est formé dans les différents aéroports brésiliens. Environ 8’500 praticiens cubains ont été forcés de rentrer chez eux à cause de la fin prématurée du programme brésilien «Mais Médicos» (Plus de Médecins). «Le départ des médecins cubains a amorcé un chaos dans l’assistance à la population brésilienne, puisqu’ils représentaient la majorité du contingent médical de ce programme», se désole Filipe Leonel, porte-parole de l’École nationale brésilienne de santé publique (ENSP).

Tensions gouvernementales

Retour en arrière: en 2013, confrontée à de nombreuses manifestations contre la pénurie de docteurs dans les zones reculées, la présidente auriverde Dilma Roussef met en place le programme «Mais Médicos», en collaboration avec l’Organisation panaméricaine de la santé (OPS). Le dispositif vise à faire appel à du personnel étranger pour répondre au manque de professionnels de la santé. Cuba et ses milliers de praticiens répondent favorablement à l’appel.

Les relations entre les deux pays se sont toutefois dégradées à la suite de l’élection de Jair Bolsonaro. D’un côté, le président brésilien a mis en doute la formation cubaine. Il a aussi dénoncé les conditions imposées par Cuba à ses médecins comme étant «dignes de l’esclavage», sans compter de supposés «actes de barbarie» commis sur les patients brésiliens. De l’autre, le gouvernement castriste évoque des «termes inacceptables» posés par Jair Bolsonaro. En guise de mesure de rétorsion, Cuba décide alors de rapatrier ses professionnels.

Un désert médical grandissant

Un an plus tard, la situation au Brésil a empiré de manière catastrophique. «Il manque essentiellement des docteurs, des infirmiers, des pharmaciens et des chirurgiens dentaires, explique Filipe Leonel de l’ENSP. Les médecins brésiliens, quant à eux, préfèrent travailler dans des infrastructures situées dans les grandes villes, mieux équipées et plus sûres.»

L’interruption du programme «Mais Médicos» a entraîné environ 100’000 décès supplémentaires, selon une étude de la revue BMC Medicine, notamment au nord du pays qui représente 60% du territoire brésilien. «La région dite du Nordeste et l’Amazonie souffrent d’un désert médical effroyable. Les premières victimes sont essentiellement des indigènes qui ont besoin d’une assistance permanente.» Les populations vivant en périphérie des grandes mégalopoles ou dans les favelas connaissent une situation similaire.



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