Texte: Chloé Thomas-Burgat
Photo: Jeanne Martel - Service d'appui multimédia (SAM)

«Ces prélèvements sont une véritable course contre la montre»

Côté professionnels

Lors de l’intervention chirurgicale, il n’est pas question de débarrasser le patient de son cancer, car ce dernier est bien trop avancé, mais de prélever une pièce — métastase ou organe — qui doit servir à l’élaboration du traitement personnalisé. Explications avec le Prof. Nicolas Demartines, chef du service de chirurgie viscérale, qui opère avec son équipe les patients que nous suivons ici en Immersion.

En quoi les prélèvements destinés à cet essai clinique sont-ils particuliers?

Il y a plusieurs aspects. D’une part, soit on enlève une métastase seule pour prélever le tissu, soit on enlève l’organe complet, mais il faut alors le faire de façon oncologique. C'est-à-dire qu’une marge de tissu supplémentaire doit être enlevée (marge de sécurité) et les vaisseaux contrôlés lors de la résection. Une fois la pièce chirurgicale enlevée, la suite du processus se déroule de façon stérile, car les cellules seront ensuite réinjectées dans le corps du patient.

Il est primordial, pour des raisons éthiques, diagnostiques et médico-légales, que les pathologues soient les premiers à voir le prélèvement.

Dès qu’elle est extraite, la pièce est remise stérilement aux pathologues. Ils font alors un diagnostic complet en analysant la marge de résection, l’infiltration veineuse ou encore le degré de différenciation des cellules. S’il s’agit d’un organe complet, les pathologues déterminent le nombre de ganglions. C’est seulement une fois que cette analyse est faite que les tissus destinés à la culture des lymphocytes peuvent être prélevés. Nous sommes sept dans le service à avoir été formés au protocole de l’essai clinique. Les trois principaux éléments qui diffèrent d’une chirurgie «standard» sont la stérilité du tissu après le prélèvement, le passage impératif chez les pathologues et la vitesse du procédé.

Pourquoi faut-il agir vite?

Ces prélèvements sont une véritable course contre la montre, car pour être mis en culture, les lymphocytes doivent être vivants.

Entre l’acte chirurgical et l’arrivée au laboratoire, il se passe au maximum entre 20 et 30 minutes.

Mais plus ce temps est court, mieux c’est.

S’agit-il d’une intervention bégnine?

Aucune opération n’est totalement bégnine, il y a des opérations courtes et longues. Chez les patients atteints d’un mélanome métastatique, on peut dire qu’il s’agit en général d’opérations courtes qui prennent entre 30 minutes et une heure. On prélève le ganglion touché ou la métastase et on referme. Pour les autres tumeurs, cela dépend de la localisation de l’organe à enlever, mais l’opération peut durer entre 2 et 5 heures.

Comment choisit-on le bon tissu?

On ne peut pas juger de la qualité du tissu avant son extraction. Ce qui importe, c’est la facilité d’accès. Il est par exemple bien plus facile de prélever une métastase sur le foie qu’à l’arrière du cœur. Un deuxième critère est le volume. Le Prof. Coukos et son équipe ont besoin de 3 cm3 au minimum pour mettre les cellules en culture.



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