Interview
Texte: Patricia Michaud et Steve Riesen
Photo: Eric Déroze

"La Suisse peut mieux faire en matière de soins palliatifs"

Gian Domenico Borasio estime que les médecins généralistes sont les piliers de l’accompagnement en fin de vie.

Le suicide assisté et la notion d’acharnement thérapeutique font l’objet de vifs débats. Dans ce contexte tourmenté, les soins palliatifs ont gagné en reconnaissance ces dernières années. Mais la Suisse peut encore s’améliorer. Une piste: placer les médecins de famille au centre de la prise en charge.

IV Où en est la Suisse dans le domaine des soins palliatifs?

GDB Plusieurs grands pas en avant ont été accomplis récemment, dont l’acceptation en 2009 d’une stratégie nationale en matière de soins palliatifs. Cette dernière a permis de dynamiser l’offre de structures ad hoc dans le pays. Autres avancées majeures: l’entrée en 2012 de la médecine palliative comme discipline obligatoire durant la formation des médecins, ainsi que son accession en 2016 au statut de sous-spécialisation à part entière, à l’image par exemple de la gériatrie. Reste que la Suisse peut mieux faire. Selon un classement international établi en 2015 par «The Economist», elle se situe au 15e rang en ce qui concerne la qualité de l’accompagnement en fin de vie.

IV Selon vous, l’avenir des soins palliatifs ne repose pas sur les épaules des unités spécialisées mais sur celles des médecins de famille…

GDB En effet, les généralistes sont les piliers de la médecine palliative. Environ 80% des personnes en fin de vie pourraient être prises en charge par leur médecin de famille, moyennant l’aide de soignants et bénévoles formés. Seuls quelque 20% des décès nécessitent une prise en charge par des spécialistes en médecine palliative. Une grande partie des malades pourrait donc en théorie rester à la maison, à condition bien sûr que les généralistes soient mieux sensibilisés et formés, et que les soins à domicile soient mieux développés. Actuellement, alors que plus des trois quarts des Suisses souhaiteraient mourir chez eux, près de 80% des décès ont lieu à l’hôpital ou en EMS.

IV Que peuvent faire les patients pour que leur volonté, par exemple celle de mourir chez eux, soit respectée s’ils perdent leur capacité de discernement?

GDB Le meilleur moyen est d’anticiper. Plus concrètement, on peut préparer sa mort comme on prépare d’autres aspects de sa vie. En Suisse, le nouveau droit de la protection de l’adulte, entré en vigueur en 2013, permet de nommer un représentant thérapeutique et d’élaborer des directives anticipées, à savoir des instructions concernant les traitements souhaités ou refusés par le patient dans une situation de fin de vie. La rédaction de ces directives devrait toujours se faire en collaboration avec le médecin traitant.



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