Editorial
Texte: Béatrice Schaad
Photo: Patrick Dutoit

Editorial: Amicalement nôtres

Béatrice Schaad Responsable éditoriale

Leurs parcours respectifs rappellent le générique de la série culte britannique «Amicalement vôtre». Ils ont étudié la médecine l’un à Genève, l’autre à Lausanne. L’un se passionne pour les neurosciences, l’autre pour le système locomoteur. Puis l’un part à Brown aux Etats-Unis durant presque dix ans, mais tous deux se retrouvent pourtant dans le même hôpital, au CHUV, dès les années 1990.

Une même intuition va fonder leur collaboration: Pierre-François Leyvraz, actuel directeur général du CHUV, et Patrick Aebischer, président de l’EPFL, nourrissent très tôt la conviction que l’innovation émanera de la collaboration des sciences du vivant et de celles de l’ingénierie.

Dans les années 1990, Patrick Aebischer travaille d’arrache-pied au développement d’un système d’encapsulation de cellules génétiquement modifiées pour lutter contre le Parkinson. Pour trouver de nouveaux matériaux, il collabore avec le Poly de l’époque. Quelques années plus tôt, Pierre-François Leyvraz, orthopédiste, a fondé un groupe de recherche à l’EPFL, avant d’y devenir le directeur de l’Institut de biomécanique translationnelle puis Professeur titulaire tout en étant également Professeur au CHUV.

Devenus respectivement les directeurs de deux grands navires, ils décloisonnent, jettent des ponts entre les disciplines. Tous deux férus d’histoire, de lettres et sensibles aux arts, ils ne se limitent pas au fait de rapprocher les sciences de la vie et de l’ingénieur, mais ils les entourent par les Humanités grâce à une collaboration fructueuse avec l’Université de Lausanne. Avec son recteur, Dominique Arlettaz, le triumvirat est convaincu que les progrès de la médecine et de l’ingénierie doivent se penser aussi au travers du prisme de la philosophie, de la sociologie ou de l’histoire des sciences. Dans le même temps, l’un construit une ville des sciences au bord du lac, l’autre toujours en lien avec le recteur, un campus hospitalo-universitaire sur les hauts de Lausanne, au Biopôle d’Epalinges. Entre ces deux sites, une ligne de métro dans laquelle tous trois encouragent les jeunes scientifiques à embarquer pour mêler leurs savoirs. On ne compte plus les chercheurs et cliniciens qui chaque jour vont et viennent sur cette voie et qui incarnent le futur de la science.

Grâce à ces trois personnalités, la région regroupe désormais de fortes compétences, non seulement dans la recherche médicale et les biotechnologies, mais aussi dans les micro et nanotechnologies ou les technologies médicales. Cette pluridisciplinarité constitue aujourd’hui un des atouts parmi les plus précieux de la région.

Pierre-François Leyvraz, Patrick Aebischer et Dominique Arlettaz illustrent à quel point la science ne peut se penser à l’échelle d’une seule institution ou même d’un canton. Qu’elle n’a de sens que si elle se réfléchit en faisant fi des frontières géographiques ou mentales, que si elle se joue des barrières et des luttes de territoires. Le progrès scientifique repose sur la vivacité de cerveaux mais aussi sur des histoires d’amitié. ⁄



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