Dossier
Texte: Carole Extermann et Stéphanie de Roguin

Jeunes et transgenres, comment les accompagner ?

Les demandes de réassignation sexuelle sont en augmentation, surtout chez les adolescentes. Ces transitions nécessitent beaucoup de soin dans la prise en charge, notamment en raison de leur impact sur la fertilité. Enquête et témoignages.

« La transidentité est un sujet complexe qui ne saurait se réduire à des considérations médicales et encore moins statistiques. » Pour Erika Volkmar, codirectrice de la Fondation Agnodice, active dans le soutien des jeunes transgenres et non binaires, l’identité de genre doit se penser dans une perspective englobant également les droits humains et notamment la question de l’autodétermination. Lors d’une transition impliquant des changements hormonaux et physiques, c’est l’hôpital qui opère, prescrit et accompagne les personnes dont le genre assigné à la naissance ne correspond pas à celui ressenti. Ponctuellement des controverses surgissent, comme celle de Keira Bell, 16 ans, rapportée par The Guardian. La jeune femme a lancé une action en justice contre la clinique londonienne Tavistock pour lui avoir prescrit des injections de testostérone et lui avoir retiré les seins trop rapidement. Au CHUV, les demandes de changement de genre se multiplient depuis quelques années, plaçant le corps médical face à un enjeu nouveau : intervenir sur des tissus sains, des corps jeunes, mais dont l’incongruence de genre les place dans une grande détresse.

Contre sept demandes de jeunes entre 18 et 25 ans en 2017, le CHUV en a enregistré 49 en 2021.

« Notre fils veut simplement vivre son identité de genre avec légitimité »

Les parents sont aussi concernés par la transition de genre de leurs enfants. Ils peuvent désormais partager leurs vécus dans le cadre d’associations, comme le témoigne cette maman.

À Genève, l'association TransParents vient d'être constituée pour les parents et proches de jeunes trans et non binaires qui souhaitent échanger entre eux. Une mère, membre de l'association, témoigne pour son enfant né avec un sexe féminin.

« Avec mon époux, nous accompagnons depuis un an la transition de notre enfant de 14 ans. Avec beaucoup de courage, il nous a communiqué qu'il y avait une incongruence entre son sexe assigné à la naissance et son ressenti. Être parent, c'est déjà une sacrée aventure en soi. Là, c'est quelque chose que nous avons accueilli avec beaucoup de respect et d'amour malgré un grand bouleversement.

Notre enfant n'a jamais eu d'intérêt

pour le monde féminin. Tout petit,

c'est en costume de Spiderman qu'il soufflait ses bougies d'anniversaire avec le vœu de devenir un garçon. Il y a un an, tout a donc pris du sens.

Nous nous sommes posé mille et une questions. Pour intégrer cette nouvelle donne, mon mari et
moi avons cherché des relais professionnels parce que tout cela était nouveau pour nous. Nous avons découvert Le Refuge, un espace d'accueil pour les jeunes LGBTIQA+ et leurs proches, situé à Genève, qui a été essentiel dans notre cheminement.

Petit à petit, le ‹ pourquoi › s'est transformé en ‹ comment › ; comment l'aider à vivre son identité de genre de façon authentique et comment en parler autour de nous. Avec le cercle rapproché, ça s'est très bien passé. Avec la famille, c'était un peu plus compliqué, notamment à cause du clivage générationnel.

La thématique de la transidentité est complexe, et malheureusement trop souvent présentée dans les médias sous l'angle d'un phénomène de mode. Chaque personne a son propre parcours et sa propre histoire. La démarche de notre fils n'est pas militante. Il veut simplement vivre son identité de genre avec légitimité.

Sa transition sociale s'est faite en plusieurs étapes. Dans un premier temps, il s'est fait couper les cheveux très courts. On s'est adressé à lui au masculin en utilisant le diminutif de son prénom de naissance, qui est neutre. Depuis, nous avons choisi en famille un prénom masculin qui lui convient. »

Cette augmentation des demandes de transition reste difficilement explicable. Selon certaines spécialistes, elle n’indiquerait pas une augmentation des dysphories de genre. Elle serait plutôt liée au fait que le « coming out trans » est devenu moins tabou, facilité par une plus grande visibilité du sujet dans l’espace public. Certaines personnes trans, pour qui le coming out était inimaginable, se limitaient jusqu’ici à adopter le style vestimentaire et les attitudes de l’autre sexe, elles savent qu’elles peuvent désormais changer de prénom officiellement, et éventuellement recevoir des hormones et effectuer des opérations chirurgicales. Dès lors, l’hôpital s’organise et cherche les meilleures solutions pour répondre de la façon la plus juste à ces demandes.

1. La construction du genre

Médicalement, il n’existe aucune explication certaine qui permette de comprendre pourquoi l’on se sent plutôt homme ou plutôt femme. Selon le psychanalyste et philosophe Jean Laplanche, le genre précéderait même le sexe. « On peut effectivement considérer que la construction du genre chez l’enfant commence déjà dans les fantasmes de ses parents, qu’il est influencé par le fait d’apprendre, lors de l’échographie prénatale, s’il s’agit d’une fille ou d’un garçon, détaille Dana Pamfile, psychiatre-psychothérapeute spécialisée dans le suivi des adultes trans et en questionnement de genre au CHUV. Après, la construction de l’identité de genre se poursuit dans les interactions précoces, par des processus psychiques complexes d’identification à l’autre et par l’autre. Viendra ensuite le temps charnière de la puberté, avec le développement des caractères sexuels secondaires et la sédimentation de l’orientation sexuelle qui vont également contribuer au développement de l’identité de genre et à son évolution. Enfin, l’adulte connaît aussi des moments de remise en question dans son rapport au genre au moment de devenir parent, par exemple. »

Ces influences ne permettent toutefois d’expliquer que partiellement pourquoi des incongruences de genre surviennent, parfois dès 3 ou 4 ans. La WPATH, l’Association mondiale des professionnels pour la santé transgenre, qui sert actuellement d’autorité en la matière, détaille dans un document dédié aux standards de soins comment la transidentité se manifeste chez le jeune enfant, tout en précisant que sa persistance à l’adolescence et à l’âge adulte reste faible et témoigne souvent des explorations constitutives du psychisme en développement. Elle peut être évoquée verbalement, à travers le souhait d’appartenir à l’autre sexe ou par des plaintes concernant des caractéristiques physiques et des fonctions génitales. Les enfants concernés peuvent aussi préférer les jeux, les vêtements et les activités ordinairement rattachés à l’autre genre.

D’après la WPATH, la transidentité apparaît lorsque l’expression de genre ne coïncide pas avec les caractéristiques stéréotypées associées à son sexe. Elle ne doit surtout pas être considérée comme intrinsèquement pathologique ou négative. « Les personnes qui ne se sentent pas en adéquation avec le genre qui leur a été assigné à la naissance n’en souffrent pas nécessairement, précise Dana Pamfile. C’est seulement lorsque la souffrance devient cliniquement significative et que des troubles psychiques du type anxieux ou dépressifs apparaissent en lien avec cette incongruence que l’on peut parler de dysphorie de genre. Il est important de noter que les personnes concernées ne souhaitent pas toutes des traitements de réassignation hormono-chirurgicale. »

Lorsqu’un tel diagnostic est posé chez le jeune enfant, un suivi psychologique et familial peut être proposé pour suivre l’évolution de la dysphorie et accompagner les transformations liées à la puberté. L’enfant peut aussi effectuer un changement de genre familial et social, c’est-à-dire se faire appeler par un prénom et pronom en accord avec le genre ressenti. « Le danger serait de suivre un parcours fléché, explique Mathilde Morisod Harari, cheffe de la filière pédopsychiatrie de liaison du CHUV. Chaque situation est différente. En tant que professionnelles de la santé, nous nous devons de bien comprendre ce qui se joue dans ces types de demandes. Parfois, la situation est très claire, parfois le jeune patient réclame un accompagnement plus long pour comprendre son histoire. La première urgence est que la demande du jeune soit entendue et reconnue. »

2. Une période particulièrement critique

La préadolescence constitue un moment de grand basculement pour les personnes transgenres. L’apparition des caractères sexuels secondaires – la pilosité, les seins, la mue – peut à ce moment-là s’avérer invivable lorsque ces signes ne coïncident pas avec l’identité de genre ressentie. Comme d’autres pays, la Suisse a connu ces dernières années une augmentation des demandes de prise en charge de la part des personnes âgées de 18 à 25 ans. En effet, en 2017, le CHUV accueillait 7 patientes de cette tranche d’âge, dont 1 femme trans et 6 hommes trans, alors qu’en 2021, 20 femmes trans et 29 hommes trans ont été comptés. Des personnes s’identifiant comme non-binaires consultent également, mais de manière très sporadique. Les services de soins cherchent les meilleures solutions pour soulager la souffrance de ces jeunes. « Ce n’est pas simple, il y a, d’une part, la demande, souvent pressente, de la personne concernée et, d’autre part, nos protocoles internes qui impliquent nécessairement un accompagnement pluridisciplinaire et obligent donc à prendre le temps, explique Nelly Pitteloud, professeure et cheffe de service d’endocrinologie du CHUV. Je refuse notamment de voir un jeune qui n’est pas accompagné par une psychiatre. » Pour Lucas, 15 ans, jeune homme trans, les seins représentent l’obstacle principal à son bien-être. S’il ne souhaite pas prendre de testostérone pour l’instant, il attend avec impatience ses 16 ans pour pouvoir se faire enlever les seins. « Je prends ma douche dans le noir, ou alors avec mon téléphone pour regarder des vidéos et ne pas y penser. Mes seins m’ont toujours dérangé. La journée, je les masque avec un binder – une forme de corset – et je porte des vêtements noirs et amples. »

Pour freiner le développement de ces caractères sexuels secondaires, il est possible d’administrer aux jeunes trans des bloqueurs de puberté. Cette solution est encore discutée au sein du personnel médical. « Ce qui nous manque beaucoup, ce sont des études sur le sujet, soulève Nelly Pitteloud. Il en existe pour les adultes, mais pas pour les jeunes. Nous avons très peu d’expérience sur les effets de tels traitements sur les corps en croissance, au début de la puberté. » La prise de bloqueurs d’hormones intervient au stade 2 ou 3 de l’échelle de Tanner, une catégorisation de l’évolution pubertaire chez l’enfant. Autrement dit, au moment où la puberté est à peine entamée : les testicules et le pénis ont légèrement grossi ou le bourgeon mammaire vient d’apparaître et l’aréole commence à augmenter. « La prise de bloqueurs d’hormones s’accompagne aussi d’une surveillance médicale, ajoute Kanetee Busiah, endocrinologue pédiatre au CHUV. La testostérone et l’œstrogène jouent un rôle important dans le développement général, dont la maturation osseuse. » Le jeune doit donc faire tous les trois à six mois une évaluation médicale lorsqu’il prend des bloqueurs d’hormones.

L’hôpital avance ainsi, tentant d'accompagner des personnes qui réclament la dépathologisation de leur transition, mais qui peuvent difficilement se passer de la médecine. « Si l'on répond immédiatement à la demande de certains jeunes sans prendre le temps d'une bonne évaluation de leur situation, cela peut être dangereux, car dès qu'il y a une prise d'hormones ou une opération, tout retour en arrière est difficile, voire impossible », explique Mathilde Morisod Harari. La dysphorie de genre, encore classifiée jusqu’à l’an dernier comme une maladie mentale, est désormais comprise dans la catégorie des problèmes liés à la santé sexuelle.

En Suisse, pour garantir le remboursement des soins par l’assurance de base, il faut obtenir un certificat de dysphorie de genre délivré par une psychiatre.

Le diagnostic de dysphorie de genre repose sur le vécu subjectif de la personne ; lui donner du sens suppose de revisiter son histoire pour comprendre la façon dont s’est forgé son rapport au genre et au sexe », précise la psychiatre Dana Pamfile. Il est également capital de s’assurer que la transidentité n’est pas le symptôme d’une maladie. « L’adolescence est aussi le moment où les troubles psychopathologiques peuvent se cristalliser. Dans de rares cas, la dysphorie de genre relève d’une entrée en psychose ou d’une dysmorphophobie, par exemple. » Dans ces cas-là, il faut d’abord traiter ou stabiliser le trouble sous-jacent et observer si l’incongruence de genre persiste avant d’accéder à des traitements de modification corporelle.

Parmi les recommandations liées aux standards de soins publiés par la WPATH figure, dans la question de l’évaluation de la dysphorie de genre, la considération du soutien social et familial. « Ce facteur a une importance majeure dans la qualité de vie des personnes trans, surtout lors de leur transition », dit Dana Pamfile. Mais cette mission peut s’avérer difficile pour l’entourage, qui ne sait pas forcément à quel type de structure s’adresser, quel vocabulaire adopter, ni comment entourer la personne en transition. « Le sujet ne m’était pas totalement inconnu, mais spontanément, je ne savais pas auprès de quelles organisations trouver de l’aide, détaille Sarah, la maman de Lucas. Finalement, j’ai fait des recherches sur internet et j’ai partagé mes résultats avec mon fils. Ensuite, je l’ai laissé choisir où il était le plus à l’aise de se rendre. » À l’école, la transition de Lucas est particulièrement mal acceptée. Le corps enseignant de l’institution privée dans laquelle il est inscrit refuse de l’appeler par les prénom et pronom qu’il souhaite. « Une fois, Lucas est rentré de l'école le visage en sang. L'angoisse qu'il y vivait était tellement intense qu'il s'était fait du mal à lui-même. Je le soutiens, bien entendu, mais ce n’est pas évident tous les jours. »

Au cours de la préadolescence, la mission du jeune transgenre est de préparer en collaboration avec sa famille et le personnel médical le passage à l'adolescence puis à l'âge adulte, moments à partir desquels les options de transition hormonales et chirurgicales deviennent accessibles. Pour pouvoir laisser le jeune totalement libre de ses choix, les médecins doivent s’assurer qu’il est pleinement capable de discernement.

3. L’art de l’auto-décision

Le consentement éclairé, c’est lorsque l’adolescente possède la capacité de s’autodéterminer. C’est-à-dire que c’est la perception intime de la personne concernée qui fait foi. Pourtant, même si le corps médical ne doit pas intervenir dans la détermination de genre, il joue un rôle crucial dans l’information qui est fournie sur la transition et ses enjeux. La fertilité en fait partie et constitue un point capital. Avant d’entamer un traitement, qu’il soit hormonal ou chirurgical, il faut choisir s’il est nécessaire de conserver des gamètes, ou non. « Se projeter parent à 15 ans, ce n’est pas simple, rappelle Mathilde Morisod Harari, cheffe de la filière pédopsychiatre de liaison du CHUV.

Le problème est qu’à 15 ans, il est rare que ces jeunes veuillent des enfants. Dans le cas de ceux que nous rencontrons, cette question de la parentalité est souvent entravée par l'urgence qu'ils vivent à entamer un traitement hormonal. Actuellement, peu sont demandeurs d'une préservation de leurs gamètes. » Or, le prélèvement et la conservation de sperme ou d’ovules n’est pas un geste nouveau : les équipes ont l’habitude de le faire pour des enfants qui doivent recevoir un traitement lourd, comme dans le cas d’un cancer. Pour les jeunes hommes trans, la gestion des menstruations peut constituer une autre difficulté. Pour limiter au maximum les règles, ils peuvent prendre une pilule contraceptive continue.

Une fois la question de la fertilité abordée et les enjeux de la prise d’hormones clarifiés, la personne peut commencer son traitement, qui devra être pris à des fréquences régulières, et à vie.

« Au CHUV, nous passons par un blocage du système endogène avant d’administrer les hormones du genre vers lequel la personne souhaite transiter », détaille Nelly Pitteloud. Après la première prise d’hormones, et en fonction du dosage, il faut attendre trois à six mois avant de voir des effets visibles sur le corps et environ deux ans pour un changement total.

Les hormones peuvent être administrées par injection ou grâce à un gel appliqué sur le corps dans le cas de la testostérone et sous forme de patch ou de comprimé pour les œstrogènes. « Dans 70 à 80% des cas, ça se passe extrêmement bien, mais pour quelques personnes, le traitement est mal vécu. C’est souvent le cas quand leurs attentes étaient trop élevées. » Lors de la prise de testostérone, pour une transition de femme à homme, on observe une augmentation de la taille du clitoris, la voix qui devient plus grave, une intensification de la pilosité faciale et corporelle, l’arrêt des menstruations et une baisse du pourcentage de graisse corporelle par rapport à la masse musculaire. Dans le cas de la prise d’œstrogènes, pour un passage d’homme à femme, la poitrine gagne du volume. On peut aussi observer une baisse de la fonction érectile ainsi qu’une augmentation du pourcentage de graisse corporelle par rapport à la masse musculaire. « Pour les transitions de femme à homme, on arrive à induire des caractéristiques secondaires très proches, mais l’inverse est plus complexe. Il est par exemple plus difficile de rendre aiguë une voix grave. » Aussi, les caractéristiques acquises par la prise d’hormones ne sont pas toutes réversibles, même si le traitement est interrompu. La taille du clitoris ou encore la hauteur de la voix sont notamment des éléments irréversibles.

Dans le cadre d’une transition de femme à homme, une étape particulièrement importante est la mastectomie. Une opération qui consiste simultanément à retirer les seins de la personne, et à lui créer un torse. En Suisse, elle peut être réalisée à partir de l’âge de 14 ans. La mère de Tom* témoigne pour son fils de 17 ans qui vient de bénéficier d’une telle intervention. « Le problème de rejet de la poitrine dont souffrait Tom nous a d’abord été rapporté par l’infirmière scolaire. Après un suivi par des psychiatres pendant plusieurs mois, Tom et nous-mêmes sommes arrivés à la conclusion qu’une transition s’avérait nécessaire. Mon fils a commencé la prise de testostérone, faiblement dosée, à partir de 15 ans, puis nous avons entamé des démarches pour l’opération du torse. » Initialement prévue pour novembre 2021, l’opération a dû être repoussée en raison de la pandémie. « Ce report de l'intervention a causé une grande détresse chez Tom. Il a dû être hospitalisé durant dix jours pour éviter qu'il ne nuise à sa propre vie. Désormais, il revit.

J’ai compris en côtoyant mon enfant que la dysphorie de genre est une souffrance de chaque seconde. Le fait de changer de sexe n'a rien de fun. »

Les opérations génitales constituent souvent la dernière étape de la transition et ne sont pas systématiquement réalisées. « De plus en plus, l’hormonothérapie suffit, surtout chez les hommes trans, qui constituent actuellement la majorité des personnes qui transitent au CHUV », ajoute Nelly Pitteloud. Pourtant, la question semble cruciale auprès des jeunes. « T’es un garçon, alors t’as un pénis ? », répète-t-on systématiquement à Lucas. Un constat que partage la mère de Tom. « Tout ce qui intéresse les autres, c’est ce qu’il se passe en dessous de la ceinture et son orientation sexuelle. »

Les domaines du sexe, du genre et de l’orientation sexuelle sont cependant bien distincts. Ainsi, une personne transgenre, tout comme une personne cisgenre peut être homosexuelle, hétérosexuelle, ou bisexuelle. Ces domaines sont au cœur des formations dispensées par la Fondation Agnodice, impliquée pour garantir l’intégralité des droits et des responsabilités des personnes transgenres. « Ce qui manque actuellement, c’est de la formation sur le sujet, pointe Adèle Zufferey, codirectrice de la Fondation. Savoir comment on accueille des personnes trans en consultation concerne tous les métiers du domaine de la santé. Aujourd’hui, les professionnelles sont souvent démunies. » Une situation que Lucas rencontre, par exemple, lorsqu’il se rend à la pharmacie pour retirer sa pilule contraceptive. « Je me réjouis que ce type d’actions deviennent ordinaire. » /



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Chiffres

700%

Au CHUV, le nombre de demandes
de changement de genre est passé de 18 en 2017 à 155 en 2021, ce qui correspond à une augmentation de plus de 700%.

/

29

De 6 en 2017, le nombre de demandes de réassignation provenant de femmes est passé à 29 en 2021 chez les jeunes
de moins de 25 ans, au CHUV. Les demandes de réassignation dans l’autre sens sont passées de 1 à 20 au cours
de la même période.

Lexique

TRANS WOMAN

Cisgenre

terme désignant une personne dont l’identité de genre (masculin ou féminin) correspond à son sexe biologique.

DYSPHORIE

une personne souffre de dysphorie lorsque des symptômes pathologiques émergent de l’inadéquation entre le genre auquel elle a été assignée et le genre ressenti.

Femme trans

personne assignée homme à la naissance, mais dont l’identité de genre est féminine.

Gender fluid

expression utilisée par les personnes dont le genre oscille entre la masculinité et la féminité.

Homme trans

personne assignée femme à la naissance, mais dont l’identité de genre est masculine.

Incongruence de genre

quand le genre assigné à la naissance défini en lien avec l’apparence du sexe de la personne ne correspond pas au genre auquel la personne concernée se sent appartenir.

Passing

phénomène qui implique qu’un individu peut facilement être considéré comme appartenant au groupe social, ici le genre, auquel il souhaite se rattacher.

Transgenre

terme désignant une personne qui adopte l’apparence et l’attitude d’un genre différent de celui qui lui a été assigné à la naissance, qu’elle ait fait ou non sa transition.

Transition

processus par lequel un individu change de genre, sur le plan légal, social (changement de nom) et/ou médical.

→
Une personne transgenre doit être appelée selon son genre de destination.

Chelsea Manning a réalisé son coming out trans le jour de sa condamnation à trente-cinq ans de prison en août 2013 pour avoir livré, trois ans auparavant, des centaines de milliers de documents hautement confidentiels à WikiLeaks. Elle était alors engagée en tant qu’analyste de l’armée américaine au moment de la guerre en Irak. Elle devra attendre 2015 pour avoir accès à une thérapie hormonale. Libérée depuis, elle a été engagée l’an dernier par la start-up Nym Technologies, basée à Neuchâtel, pour soutenir le développement d’un réseau qui protégerait la vie privée sur Internet.