Tandem
Texte: Bertrand Tappy
Photo: Eric Déroze

Francine Behar-Cohen et Carlo Rivolta

La rétinologue Francine Behar-Cohen et le généticien Carlo Rivolta travaillent sur une thérapie contre les dégénérescences de la rétine.

Qu’ils soient bleus, marron ou verts, les yeux ont été les premiers organes à mettre en évidence les principes des maladies héréditaires et par conséquent de notre patrimoine génétique. Ce n’est donc pas un hasard si nos gènes et nos globes oculaires constituent aujourd’hui l’un des duos les plus étudiés en génétique humaine.

Dans son laboratoire de la Cité hospitalière lausannoise, Carlo Rivolta compte parmi les généticiens les plus reconnus en la matière. Il dirige un laboratoire chargé de trouver les déterminants génétiques des dégénérescences rétiniennes, des maladies difficiles à dépister et qui touchent environ 1 personne sur 3’000.

«Les maladies que nous étudions peuvent être causées par l’altération de plus d’une centaine de gènes, explique le spécialiste. On peut donc voir 100 patients atteints par la même maladie sans trouver de liens entre eux au niveau de l’ADN!» Pour les aider, Carlo Rivolta et ses collègues peuvent aujourd’hui compter sur deux éléments essentiels: les progrès de la technologie et la mise en réseau de leurs résultats grâce au projet «Transvision» mis sur pied par Francine Behar-Cohen, directrice médicale de l’Hôpital ophtalmique Jules Gonin à Lausanne.

«Transvision est un réseau multidiscilplinaire qui associe l’Inserm, l’Hôpital ophtalmique et ses chercheurs, explique-t-elle. On compte également des partenaires du CHUV et de l’EPFL.» Entre les cliniciens et les généticiens, les rôles sont clairement distribués: les premiers ont la mission de diagnostiquer les pathologies des patients et fournir aux seconds des échantillons d’ADN.

«Autrefois, décrypter le génome était une opération chère et laborieuse, se souvient Carlo Rivolta. Il fallait cibler ses recherches en espérant avoir de la chance. Aujourd’hui, nous pouvons avoir toute l’information d’un coup.» «Le rôle des cliniciens s’est ainsi complexifié, ajoute Francine Behar-Cohen. Ils doivent analyser les mécanismes des maladies pour orienter sur des cibles moléculaires potentielles et pour trouver des mécanismes communs qui permettent de réconcilier les absences de corrélations entre phénotype et génotype.» Une quête qui a déjà donné ses premiers fruits, avec l’identification de nouveaux gènes.

Et à l’avenir? «Nous pourrons développer des thérapies personnalisées en fonction du gène touché, espère Carlo Rivolta. Dès que nous aurons identifié tous les gènes pouvant causer la maladie, il restera à répondre à la question: quel est le mécanisme commun pour lequel de si nombreux et différents défauts de l’ADN peuvent causer la même maladie? Une fois qu’on aura trouvé ce mécanisme, on aura trouvé aussi une cible thérapeutique potentielle pour toutes les personnes atteintes.» Une longue démarche que les scientifiques de «Transvision» auront à effectuer dans les années à venir. «Il n’y a qu’un réseau multidisciplinaire – à l’image du nôtre – pour y arriver», conclut Francine Behar-Cohen.



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Fiche des chercheurs

Carlo Rivolta

Francine Beha-Cohen

Transvision est un réseau multidiscilplinaire qui associe l’Inserm, l’Hôpital ophtalmique et ses chercheurs.