Décryptage
Texte: Erik Freudenreich
Photo: Philippe Gétaz

Protons contre cancer

Protonthérapie. Détruire les tumeurs en les ciblant avec un faisceau de protons, voilà le principe de la protonthérapie. Une technique de pointe qui permet de traiter avec succès certains cancers de l’œil ou du cerveau. Reportage à Villigen, à l’Institut Paul Scherrer.

Considérée par de nombreux spécialistes comme la technologie du futur dans la lutte contre le cancer, la protonthérapie est une forme de radiothérapie qui permet de s’attaquer aux tumeurs de manière très précise à l’aide de protons, des particules élémentaires chargées positivement. Le faisceau de particules utilisé atteint une exactitude sans commune mesure avec les traitements de radiothérapie conventionnelle, les protons se dispersant peu le long de la trajectoire du rayon.

De plus, les protons traversent la matière pour déposer leur énergie à une profondeur donnée avant de s’arrêter net. Il s’agit là du «pic de Bragg», référence au physicien anglais William Bragg (1862-1942) qui fut le premier à décrire cet effet. Résultat: les protons détruisent
la tumeur tout en préservant au mieux les tissus environnants.

Cette technique est ainsi particulièrement adaptée pour traiter des cancers situés à proximité d’organes sensibles comme le cerveau ou l’œil. La protonthérapie offre également d’excellents résultats pour soigner enfants et jeunes adultes, du fait de la moindre toxicité du traitement.

1/ Le Centre de protonthérapie de l’Institut Paul Scherrer

Plus grand centre de recherche de Suisse dans les domaines des sciences naturelles et de l’ingénierie, l’Institut Paul Scherrer (PSI), à Villigen (AG), traite des patients par protonthérapie depuis 1984. Si la moitié des personnes soignées au PSI viennent de Suisse, son centre de protonthérapie accueille aussi des patients en provenance des pays européens voisins, de Russie ou des Etats-Unis. «Les cas qui nous sont transmis par les différents hôpitaux sont dans une première étape analysés au sein de notre «tumor board» sur la base d’un dossier médical complet, explique Damien Weber, directeur du centre de protonthérapie et membre de la direction du PSI. A l’occasion de cette réunion, nous étudions chaque cas en détail avec les physiciens, radiooncologues et techniciens, de manière à s’assurer des avantages à traiter le cas présenté.»

2/ L’évaluation

Une fois qu’un cas est accepté, le patient est invité pour une première consultation au centre de protonthérapie. «Nous lui présentons alors le traitement, les résultats et risques qui y sont associés, précise Damien Weber. L’équipe du centre élabore ensuite un plan d’attaque contre la tumeur, qui est simulé sur ordinateur. Un des points qui nous distingue est le meeting hebdomadaire que nous consacrons à la délinéation (traçage du contour des tumeurs, ndlr). Il est important de disposer d’un faisceau très précis, mais il est aussi essentiel d’analyser précisément le volume tumoral à traiter, pour être certain de ne pas manquer la cible.»

3/ Le Gantry

Quelques semaines après sa première visite, le patient revient au centre pour commencer son traitement. A l’instar de la radiothérapie conventionnelle, la protonthérapie est délivrée durant plusieurs sessions réparties dans le temps. A cet effet, le centre du PSI dispose de trois équipements: OPTIS2 (pour les mélanomes de l’œil) ainsi que les Gantry 1 et 2 (ci-contre), qui permettent de traiter les cancers du cerveau et de la sphère ORL, mais aussi certains chondrosarcomes (tumeurs malignes du cartilage).

4/ La salle de contôle

Après avoir été installé dans le Gantry, le patient peut communiquer par micro interposé avec les techniciens situés au sein de la salle de contrôle. Ces derniers lancent alors le traitement. Le faisceau de protons est délivré par le cyclotron COMET. Mis en service en 2007, il s’agit d’un accélérateur de particules circulaire spécialement dédié au centre de protonthérapie du PSI.



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